Des urinoirs féminins secs aux Grands Voisins !

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DES URINOIRS FÉMININS AUX GRANDS VOISINS

Le concept :

Créé par Louise Raguet depuis le mois d’avril, l’urinoir Marcelle a d’abord été testé dans des festivals pendant l’été 2019 (We Love Green, Château Perché, Macki Festival).

Cet urinoir, en plus d’être écologique et engagé, représente d’un point de vue pratique  un gain de temps non négligeable pour les femmes (moins d’attente). Bien qu’il n’y ait pas de portes (dans la logique du gain de temps), l’intimité est garantie par des murs qui cachent la personne en train d’uriner. Le design de l’urinoir permet un usage instinctif. 

 

Une utilisation simple : 

  • pour le pipi uniquement 
  • se mettre dos à l’urinoir en position semi-accroupie
  • accès seulement pour les femmes 
  • c’est un “urinoir sec” donc sans chasse d’eau, donc pas de papier dans l’urinoir (mais dans la poubelle !) 

 

Pourquoi un urinoir réservé au sexe féminin ? 

Il n’y a pas de porte fermée à clé donc c’est nécessaire que cet espace soit dédié uniquement aux femmes. De plus, l’urinoir a vraiment été conçu pour un pipi de dos en position semi-accroupie. Si un homme vient faire pipi face à l’urinoir, la direction du jet est différente et cela provoque de fortes éclaboussures qui salissent l’espace. Donc messieurs, ça n’est pas contre vous, mais chacun son urinoir !

 

La question du genre

Un urinoir est un objet dans lequel on ne fait qu’uriner, et si possible sans toucher les bords. Il est compliqué pratiquement pour les personnes possédant une vulve d’uriner en étant de face. C’est pourquoi un objet urinoir différent de ceux qui existent actuellement (adaptés uniquement aux pénis) était nécessaire pour les personnes qui ont une vulve. Ce qui importe donc pour l’accès à cet urinoir est l’anatomie physique, et non le genre. Et comme indiqué précédemment, c’est aussi important pour garantir l’intimité de ses utilisatrices, en l’absence de porte qui ferme. 

Pour toute proposition de nom plus inclusif, vous pouvez écrire à Louise, la créatrice de cet urinoir sur Facebook et Instagram  (Urinoir Marcelle). 

L'URINOIR SEC ET LE CERCLE VERTUEUX DU PIPI-ENGRAIS

Comment ça marche le pipi-engrais ? 

L’urinoir Marcelle a été imaginé dans le contexte de la “séparation à la source”, c’est à dire la collecte de l’urine pour fabriquer de l’engrais. En effet, l'urine contient la majorité des nutriments que nous excrétons (azote, phosphore, potassium). Ces nutriments sont perdus dans l'eau et deviennent une forte source de pollution des rivières. Nous devons donc nettoyer cette eau, avec des usines coûteuses d'un point de vue économique et énergétique (les stations d’épurations). Par ailleurs, en agriculture, la synthèse d'engrais azoté consomme énormément d'énergie (2% de la consommation énergétique mondiale). Les engrais phosphorés quand à eux proviennent de ressources minières non renouvelables. De plus, 20 % de la consommation d’eau potable des foyers est utilisée pour charrier les urines et les matières fécales dans les réseaux.

L'urine est salubre donc sa collecte et son utilisation en agriculture est envisageable sans risque sanitaire. Aux Grands Voisins, les cuves situées sous les urinoirs peuvent recueillir 5 000 Litres d’urine (représentant plus de 10 000 pipis). La collecte de 10 000 pipis tous les 2 mois permet de fertiliser une surface sol de 1 500 m². Cette surface sert à faire pousser des légumes, qui sont ensuite acheminés jusqu'en ville pour être cuisinés et se retrouvent dans vos assiettes ! C'est donc un circuit sans fin. 

Fun fact : les villes ont pratiqué la valorisation agricole de leurs excréments pendant des siècles jusqu’à l’apparition des engrais chimiques et du “tout-à-l’égout”.

La vidange et la valorisation en agriculture sont assurées par l’entreprise de location et services de toilettes sèches Toilettes & Co. L'urine est ainsi acheminée vers des champs près de Fontainebleau (Île-de-France). 

Paris & Métropole Aménagement finance cette première expérimentation afin d’étudier la possibilité de récolter l’urine dans le  futur quartier St Vincent de Paul

 

Les enjeux pharmacologiques 

Beaucoup d’inquiétudes concernent la présence des molécules provenant de médicaments et de pilules contraceptives dans l’engrais produit, et donc dans les aliments issus de cette agriculture et prêts à la consommation. 

Il faut savoir qu’il est extrêmement difficile de se débarrasser des hormones et antibiotiques dans ce processus, puisque même les stations d’épuration qui nettoient les eaux n’y parviennent pas. Ces éléments se retrouvent donc de toute façon dans nos rivières, ainsi que dans nos sols, en partie à cause de l’utilisation des excréments des animaux d’élevage (fumier…), qui ingèrent également ces éléments, parfois en quantités encore plus grandes que les humains. 

C’est cependant dans les rivières qu’ils font le plus de dégâts car ces molécules sont faites pour être en milieu aqueux. A l’inverse, les champs possèdent un écosystème très riche en micro-organismes dans le sol, qui participe ainsi à la dégradation de ces molécules, et ne favorise pas leur développement puisqu’elles ne sont donc plus en milieu aqueux. Les molécules nocives ont alors moins de chances de dégrader les écosystèmes. 

Par ailleurs, il a été montré que si une plante pousse avec des résidus de pilule contraceptive dans leur sol elle ne les absorbe pas. Par exemple, un plant de tomate qui pousse avec de l'urine dans laquelle il y aurait des œstrogènes ne va pas donner des tomates aux œstrogènes !

 

Il est donc difficile de produire un engrais sans ces enjeux pharmacologiques quand la source du problème provient des habitudes de consommation et de production. Des études sont cependant en cours pour étudier l'impact de ces molécules sur nos sols agricoles, notamment via le groupe de recherche OCAPI du Leesu avec lequel Louise, la créatrice de nos urinoirs féminins, collabore. 

 

 

La recette du pipi-engrais à reproduire chez soi :

25cl d'urine diluée dans 5L d'eau, à mettre une fois toutes les deux semaines dans la terre de vos plantes, sauf en hiver.

Les illustrations de la fresque du pipi-engrais ont été réalisées par Simon Geneste.

L'installation a été réalisée en collaboration avec Yes We Camp et Urinoirs Marcelle.

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