Bilan : 10 intentions transformées en actes

10 INTENTIONS TRANSFORMÉES EN ACTES

Les Grands Voisins, c’est l’expérience unique, aux conditions sans cesse renouvelées, d’utilisation d’espaces temporairement vacants, pour répondre à des besoins fondamentaux : se loger, se nourrir, se réaliser et partager un espace, du temps, ensemble.

Entre 2015 et 2020, dans l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul, situé dans le 14è arrondissement de Paris, une des plus grandes occupations temporaires d’Europe, aux usages et publics mixtes et variés, se déploie sur un terrain de 3,4 hectares. 

Pendant cinq ans,plusieurs milliers de personnes habitent, travaillent et partagent les espaces. Elles tissent d’autres manières d’être en ville ensemble et proposent des formes nouvelles de solidarité et de créativité. L’expérience menée permet d’apporter des éléments de réponse pour résoudre des problématiques inhérentes aux métropoles contemporaines : de quelle façon peut-on accueillir et loger les plus démunis et leur laisser une place ? Comment trouver des locaux abordables pour lancer son activité, là où le marché les rend inaccessibles ? Quelles formes nouvelles pour des lieux de rencontres, de production et de création, qui laissent la place à de l’implication volontaire et amatrice dans nos villes d’experts et de spécialistes ? Comment adapter nos modes de vie et transformer nos villes, face aux enjeux écologiques ?

Les Grands Voisins ont transformé une dizaine d'intentions initiales en en actes et réalités.
Voici la synthèse de ces cinq années, illustrées en chiffres et en images.
Par les équipes de l'association Aurore, de la coopérative Plateau Urbain et de l'association Yes We Camp.


Téléchargez ou consultez le "Dossier de clôture de l’expérience" (english version)


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1 > Rendre utiles des espaces provisoirement désaffectés

3,4 hectares vides dans Paris intra-muros à nouveau utiles

Dès 2012, les services de l’hôpital se vident et les portes commencent à se murer.

Les 19 bâtiments devaient rester clos, désaffectés et gardiennés. Mais, avec la conjonction de volontés politiques d’acteurs, dans le laps de temps de conception du futur quartier, les espaces retrouvent une utilité pour des personnes vulnérables ayant besoin d’un toit, pour des porteurs de projets à la recherche d’un espace de travail ainsi que pour les riverains, parisiens et visiteurs cherchant à s’impliquer dans des projets citoyens.

Des espaces pour simplement boire un verre, se retrouver, se cultiver et se divertir dans un site préservé de la circulation.


2 > S’installer et vivre en cohabitation

Près de 2 000 personnes vivent et/ou travaillent sur place, dont plus de 1 000 personnes en hébergement d’urgence

Le site accueille plusieurs dispositifs d’hébergement pour les personnes vulnérables et crée des conditions de mixité sociale, avec un espace ouvert au public, des services mutualisés avec des lieux d’activités et des logements pour une petite partie des équipes de gestion.

Le site devient pour chacun une maison ou une deuxième maison. Les cinq années d’ouverture font émerger des espaces communs accessibles à des publics très variés, en permettant un décloisonnement des métiers et mondes sociaux avec davantage d’interactions humaines. La mixité ne se décrète pas, mais l’expérience crée des conditions favorables au vivre ensemble.

Cet espace intermédiaire est une chance, entre la brutalité de la rue et l’injonction à consommer des espaces privés, et permet aux résidents, aux occupants et aux riverains de se côtoyer, de se rencontrer sans a priori.


3 > Faire une place aux personnes en situation de précarité en cœur de ville

Jusqu’à 600 personnes sont hébergées par nuit pendant la première saison.

Avec plusieurs centres d’hébergement, et de nombreux dispositifs d’insertion par le travail, par le soin et la sociabilité, la place des plus vulnérables est structurante dans le projet : ils sont sur site et présents au centre de l’expérience. Près de 46 500 personnes sont reçues à l’accueil de jour pour demandeurs d’asile et réfugiés sur deux années d’ouverture. Cet accueil est ouvert du lundi au vendredi en journée et permet aux personnes d’être orientées vers des Centres d’Accueil et d’Examen de Situation (CAES) ou vers des accueils de jour classiques et autres dispositifs d’accompagnement. Cet espace permet également de se reposer, se laver, manger et communiquer avec les familles.

Près de 150 personnes vulnérables sont embauchées dans le cadre du Dispositif Premières Heures de la Conciergerie solidaire. Plus de 40% de ces personnes sont sorties du dispositif directement vers un emploi. La multitude d’activités et de publics construit un terrain propice à l’insertion par le travail avec une vingtaine de programmes ou de créations d’emplois développés.


4 > Ouvrir des espaces de travail pour des pratiques émergentes

250€/m2/an TTC CC de surface nette pour des ateliers/bureaux au cœur de Paris.

Une étude détaillée sur la nature des structures occupantes montre la répartition suivante : 37% des structures travaillant autour des arts, du spectacle et des activités récréatives, 22% sont des activités de service, 13% concernent l’action sociale, 8% l’éducation, 11% le secteur artisanal et industriel, 6% le commerce et la restauration et 3% sont des activités liées à l’agriculture et à l’environnement.

Les espaces de travail sont proposés à ces structures à 250€/m2/an TTC en ne prenant en compte que la surface nette des locaux, c’est-à-dire à une redevance quatre fois inférieure aux loyers classiques du 14e arrondissement. Cela favorise le retour à la création au coeur des villes, à maintenir des savoir-faire artisanaux, artistiques et agricoles dans une logique de réemploi et de respect de l’environnement.

Plus d’une centaine d’ateliers, boutiques ou espaces de travail sont occupés par des porteurs de projets ayant des difficultés à accéder au marché classique. 50 millions d’euros de chiffre d’affaire sont estimés sur la totalité des activités en 2017 et autant de valeurs et de richesses non monétaires créées. Les Grands Voisins ont servi de tremplin pour des jeunes structures en phase de test et d’amorçage, ou pour des structures un peu plus matures en phase de consolidation d’un modèle économique viable.


5 > Proposer un lieu d’expériences culturelles et artistiques gratuit

Plus de 300 événements culturels, éducatifs et artistiques gratuits proposés à plus de 600 000 visiteurs par an.

Pluridisciplinaire et accessible à tous, la programmation est porteuse d’expérimentation et de création, alliant événements culturels (concerts, festivals, expositions, spectacles…), activités régulières de bien-être, cours de pratiques artistiques et artisanales, interventions artistiques et aménagement des espaces extérieurs. Des temps forts rythment l’expérience : Syrien n’est fait, Migrant’scène, Carnavals, Choc Thermique, 48h de l’agriculture urbaine, la Petite Course CRIT...

La programmation des Grands Voisins est toujours restée ouverte aux propositions pour demeurer hétéroclite, riche et dense. Tous les mois, des réunions de programmation sont ouvertes aux voisins intéressés.


6 > Favoriser les interactions entre les différents métiers et disciplines

Des dizaines de secteurs professionnels représentés

Des dizaines de secteurs professionnels représentés : urbanisme, architecture, réemploi, environnement, restauration, alimentation, culture, activités récréatives, artisanat, art, information, communication, éducation partagent et mutualisent les espaces. Les acteurs de l’expérience sont nombreux : les personnes hébergées sur le site, les associations et entrepreneurs, les voisins du quartier permettent la naissance de nombreux projets collectifs.

L’émulation générale du lieu, la mutualisation des espaces communs et de réunions ainsi que la multitude de profils et secteurs d’activité sont des éléments clés pour favoriser un cadre de travail agréable et confortable. Les structures installées coopèrent avec d’autres sur le site. Ces interactions mènent à une multitude d’aventures humaines, de rencontres fortuites, d’échanges de savoir faire et de compétences divers et variés, et construisent un véritable écosystème.


7 > Offrir des cadres d’implication citoyenne

Plus de 5000 bénévoles impliqués en 5 ans.

L’expérience est possible grâce à l’implication de nombreux bénévoles qui cherchent à apprendre et développer des savoir-faire. Les espaces, le matériel et les compétences professionnels présents sur le lieu permettent d’accompagner ces volontaires. Les missions sont variées et s’adaptent aux envies et aux besoins de chacun : aide à l’accueil de jour pour demandeurs d’asile, service au bar, cuisine, cours de français, construction à l’atelier... Beaucoup de missions allient travail social et formation spécifique. Les lieux ont accueilli et supporté de nombreux événements associatifs.


8 > Faire avec ce qu’on a, en fonction du temps disponible

2 ans puis 5 ans : reconduction de la convention et succession de 3 propriétaires.

Le temps imparti à l’expérience évolue et le projet des Grands Voisins s’adapte systématiquement, avec réactivité, inventivité et frugalité, pour répondre aux envies de la communauté d’habitants et voisins, aux besoins du quartier et aux ambitions et urgences sociales actuelles. Après deux années pleines sur la totalité de l’enclos de l’ancien hôpital, la coopération avec les aménageurs du futur quartier conduit à la réduction des espaces utilisables mais invente de nouveaux formats et usages pour la saison 2018-2020.

La réorganisation s’opère pour faire face à la crise du COVID-19 avec de l’aide alimentaire. 2500 repas/jour préparés et/ou distribués aux personnes en situation de précarité en 2 mois de confinement, et une partie jusqu’à la fin de l’été 2020. Les Voisins poursuivent les élans de solidarité et inventent d’autres utilisations des espaces disponibles : en plus des cuisines des restaurants mises à disposition, un atelier couture de masques et la fabrication de valves en impression 3D pour fabriquer des respirateurs sont mis en place.


9 > Construire un modèle d’économie et de gestion réactif

2M d’€ de gestion annuelle sur un budget commun entre les 3 organisations de pilotage.

L’évolution du budget au fil des années aboutit à une trésorerie partagée entre les 3 structures pilotes et une répartition des risques financiers. Il permet de constituer une équipe d’une vingtaine de salariés, mêlant différents types de profils et permettant d’assurer une gestion quotidienne souple et proactive du lieu.

L’animation de la communauté est assurée par des permanences, temps forts, moments collectifs, petits déjeuners et repas partagés.

La gestion du site fonctionne avec un pilotage général et différents cercles de travail sur divers sujets, auxquels tous les voisins peuvent participer : aménagement d’espace, travail social, programmation culturelle… Les Conseils des Voisins, où chacun est convié, s’organisent tous les deux mois pour échanger sur les dernières évolutions du projet et partager les informations. Les trois organisations de pilotage suivent des réunions hebdomadaires pour rester réactives sur la gestion quotidienne.


10 > Transmettre l’expérience et inspirer ailleurs

Des dizaines d’expériences similaires développées en France.

L’expérience a rapidement démontré son intérêt pour ses usagers, mais aussi pour la société dans son ensemble de par les nombreuses externalités positives qu’elle génère. Une cinquantaine d’acteurs est venue à notre rencontre dans la volonté de développer ce type de projets dans des villes de 700 à 8,6 millions d’habitants en France, Belgique, Allemagne ou Etats-Unis. De plus, des centaines de sollicitations sont reçues pour des visites et demandes de participation à des conférences de la part d’acteurs publics et privés (Ted X, MIT, Urban Maestro, Open Design Afrika Festival, Ashoka Talks, Pavillon de l’Arsenal...).

Plusieurs distinctions récompensent l’expérience, comme l’exposition de la Biennale internationale d’architecture de Venise 2018 « Lieux Infinis », les trophées de l’économie sociale et solidaire décernés par la Ville de Paris ou le Palmarès des Jeunes Urbanistes.


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